1er tir Falcon Heavy - KSC - 6.2.2018 (1/2)

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J0J0Z a écrit:Messieurs, la chasse est ouverte :D 
https://twitter.com/elonmusk/status/944783379022540800
"Si je parviens à trouver le Roadster Tesla en orbite Martienne et le récupérer, je peux le garder?"

Réponse d'Elon  : "'Yes" :megalol:

J'adore ses tweets...  Il pousse à la démesure...  Le bigboss de Boeing veut être sur Mars avant Musk, il lui répond "fait le"... Maintenant, un anonyme demande s'il peut garder la voiture, il lui répond "oui".  J'adore ce côté "fait le si tu peux"

Yantar

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Les premières photos de l'intégration de la roadster sous la coiffe !
ndiver
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Euh... La page précédente est pleine de ces photos.
phenix
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Oups pas vu le lien en page 6, le forum est moins lisible sur smartphone...
ndiver
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Le monde change, ce n'est rien de le dire. L'attitude coincé du petit monde de l'astronautique, qui se présente toujours de façon martiale pour ne pas décider grand chose, vient d'être poussé aux poubelles de l'histoire par ce "gugusse" de Musk qui vient de ringardiser tout le monde. Le temps de se trouver, entre la Terre et Mars, une place de parking sur l'orbite du même nom pour sa bagnole rouge et voilà où nous en sommes. Marchera, marchera pas, peu importe, le principal c'est que ce soit au programme au même titre que le retour des hommes vers la Lune.

Quelle fin d'année !

:shock:
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Astro-notes a écrit:Le monde change, ce n'est rien de le dire. L'attitude coincé du petit monde de l'astronautique, qui se présente toujours de façon martiale pour ne pas décider grand chose, vient d'être poussé aux poubelles de l'histoire par ce "gugusse" de Musk qui vient de ringardiser tout le monde. Le temps de se trouver, entre la Terre et Mars, une place de parking sur l'orbite du même nom pour sa bagnole rouge et voilà où nous en sommes. Marchera, marchera pas, peu importe, le principal c'est que ce soit au programme au même titre que le retour des hommes vers la Lune.

Quelle fin d'année !

:shock:

Je ne suis pas aussi définitif que toi. On en prend un coup sur le cocard cette année, c'est évident. Et de grands changements sont nécessaires si on veut rester dans la course. Mais on a tous les ingrédients. En revanche, il manque terriblement un plan d'action européen, peut-être parce que la prise de conscience n'a pas encore eu vraiment lieu. Espérons que 2018 soit l'année de la contre-attaque (pour reprendre le titre de la note de l'Institut Montaigne).
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ReusableFan

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ReusableFan a écrit:Et de grands changements sont nécessaires si on veut rester dans la course.
Il est là le principe de base: tu y vois une course. D'autres n'en voient pas.
S'il n'y a pas de course, il n'y a pas besoin de bouleversement.
Mon opinion perso est quelque part entre les deux, mais je ne dirais pas personnellement qu'il y a une course. SpaceX peut rafler 100% du marché commercial et aller vers Mars pour 2€/vol, ça n'en fait pas une course pour autant. La course est dans la tête des gens, elle n'est pas factuelle, contrairement aux années 60. Puisqu'il s'agit d'une fonction quasi-régalienne et de souveraineté, la comparaison de l'institut Montaigne avec les GAFA me semble très inapproprié. Il s'agit d'un secteur qui ne sera pas laissé à la libre concurrence, les lois du marché ne fonctionnent pas dans les lanceurs. Et des lancement à 10 centimes par SpaceX ne changeraient rien à ça.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas réagir (mais réagir à quoi précisément à part "faire moins cher" ?), je dis qu'il ne faut pas mélanger ce qu'il se passe avec ce qui passe de façon plus classique dans des secteurs marchands.
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Space Opera a écrit:
ReusableFan a écrit:Et de grands changements sont nécessaires si on veut rester dans la course.
Il est là le principe de base: tu y vois une course. D'autres n'en voient pas.
S'il n'y a pas de course, il n'y a pas besoin de bouleversement.
Mon opinion perso est quelque part entre les deux, mais je ne dirais pas personnellement qu'il y a une course. SpaceX peut rafler 100% du marché commercial et aller vers Mars pour 2€/vol, ça n'en fait pas une course pour autant. La course est dans la tête des gens, elle n'est pas factuelle, contrairement aux années 60. Puisqu'il s'agit d'une fonction quasi-régalienne et de souveraineté, la comparaison de l'institut Montaigne avec les GAFA me semble très inapproprié. Il s'agit d'un secteur qui ne sera pas laissé à la libre concurrence, les lois du marché ne fonctionnent pas dans les lanceurs. Et des lancement à 10 centimes par SpaceX ne changeraient rien à ça.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas réagir (mais réagir à quoi précisément à part "faire moins cher" ?), je dis qu'il ne faut pas mélanger ce qu'il se passe avec ce qui passe de façon plus classique dans des secteurs marchands.

Je suis en profond désaccord. L'espace devient un enjeu de souveraineté majeur (pas seulement pour l'accès) et de nouvelles activités économiques naissent. Cela prendra 15 ans, mais comme pour le numérique l'Europe paiera cher de pas être à la pointe.

Et tu peux demander aux Chinois s'ils ne sont pas dans une course avec les US, et vice-versa. Les Chinois, comme les Russes en leur temps, ne le diront pas comme ça. Mais dans les faits c'es ce qui se passe. Et la première victime ce sera, j'en ai peur, Arianespace. On peut se rassurer en se disant que c'est trop important pour que la France laisse tomber. Mais avec le surcoût engendré, il va falloir se battre dur.
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Un twit annonce que le TEL est rentré dans le hangar HIF pour récupérer la Heavy. Un roll out peut être cette semaine...

Un autre montre la coiffe rentrant dans le HIF
https://twitter.com/ECDiazdeLeon/status/945692630062690304
[Insertion du tweet. David L.]
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Sous la coiffe, la bagnole ?  :eeks:
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Et oui la prochaine fois qu'on verra cette voiture ce sera dans l'espace ou éclatée aux quatre coins du KSC.
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Pas faux ! :megalol:
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ReusableFan a écrit:l'Europe paiera cher de pas être à la pointe.

Oui enfin bon, ne dramatisons pas. Arianespace a perdu un concurrent (ILS) pour un autre (SpaceX). Le premier, dans les années 1990, proposait des lancements 40% moins chers qu'Ariane. Le second propose des lancements 20 à 30% moins chers qu'Ariane. Nous ne sommes pas "hors jeu", nous sommes challengés. La nuance est importante.

Le retour d'un premier étage de F9 est, certes, impressionnant sur le plan visuel, mais dans les faits ce n'est "que" une baisse des coûts d'une trentaine de pourcents, grand maximum (selon Musk lui-même).

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capcom a écrit:Un twit annonce que le TEL est rentré dans le hangar HIF pour récupérer la Heavy. Un roll out peut être cette semaine...

Un autre montre la coiffe rentrant dans le HIF
Effectivement, une photo du TEL on vois qu'il semble être prêt à accueillir Faclon Heavy

https://twitter.com/Craig_VG/status/945687999316221952
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nikolai39 a écrit:
ReusableFan a écrit:l'Europe paiera cher de pas être à la pointe.

Oui enfin bon, ne dramatisons pas. Arianespace a perdu un concurrent (ILS) pour un autre (SpaceX). Le premier, dans les années 1990, proposait des lancements 40% moins chers qu'Ariane. Le second propose des lancements 20 à 30% moins chers qu'Ariane. Nous ne sommes pas "hors jeu", nous sommes challengés. La nuance est importante.

Le retour d'un premier étage de F9 est, certes, impressionnant sur le plan visuel, mais dans les faits ce n'est "que" une baisse des coûts d'une trentaine de pourcents, grand maximum (selon Musk lui-même).

D'autant que d'après l'excellent Aerospatium, le lancement d'une SpaceX coute environ 60M$ au client. alors que Ariane 5 propose 60M$ pour le sat en bas et 100M$ pour celui en haut . Au final pour le sat en position basse c'est un prix à égal avec SpaceX. Donc je ne trouve pas que Ariane soit à ce point non compétitif, au contraire je trouve qu'elle reste la seule concurrente crédible d'autant qu'elle affiche une fiabilité exceptionnelle, ce que ne peut pas encore se vanter la F9.
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nikolai39 a écrit:
ReusableFan a écrit:l'Europe paiera cher de pas être à la pointe.

Oui enfin bon, ne dramatisons pas. Arianespace a perdu un concurrent (ILS) pour un autre (SpaceX). Le premier, dans les années 1990, proposait des lancements 40% moins chers qu'Ariane. Le second propose des lancements 20 à 30% moins chers qu'Ariane. Nous ne sommes pas "hors jeu", nous sommes challengés. La nuance est importante.

Le retour d'un premier étage de F9 est, certes, impressionnant sur le plan visuel, mais dans les faits ce n'est "que" une baisse des coûts d'une trentaine de pourcents, grand maximum (selon Musk lui-même).

J'ai bien peur que SX + BO soient des concurrents bien plus terribles qu'ILS à son époque, à l'horizon 2025. Ils ont en outre une demande intérieure et des circuits de financement bien plus puissants. Le marché commercial international n'est pas crucial pour eux mais ils voudront le prendre quand même.

Comme disait l'autre "c'est peut-être un détail pour vous, mais pour l'Europe ça veut dire beaucoup".
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Mustard a écrit:
nikolai39 a écrit:

Oui enfin bon, ne dramatisons pas. Arianespace a perdu un concurrent (ILS) pour un autre (SpaceX). Le premier, dans les années 1990, proposait des lancements 40% moins chers qu'Ariane. Le second propose des lancements 20 à 30% moins chers qu'Ariane. Nous ne sommes pas "hors jeu", nous sommes challengés. La nuance est importante.

Le retour d'un premier étage de F9 est, certes, impressionnant sur le plan visuel, mais dans les faits ce n'est "que" une baisse des coûts d'une trentaine de pourcents, grand maximum (selon Musk lui-même).

D'autant que d'après l'excellent Aerospatium, le lancement d'une SpaceX coute environ 60M$ au client. alors que Ariane 5 propose 60M$ pour le sat en bas et 100M$ pour celui en haut . Au final pour le sat en position basse c'est un prix à égal avec SpaceX. Donc je ne trouve pas que Ariane soit à ce point non compétitif, au contraire je trouve qu'elle reste la seule concurrente crédible d'autant qu'elle affiche une fiabilité exceptionnelle, ce que ne peut pas encore se vanter la F9.

Deux remarques :
- quid de la flexibilité ? SX va de plus en plus lancer de manière flexible avec son stock de lanceurs et ses trois pas de tir. Pas besoin d'attendre qu'un autre sat de la bonne taille soit prêt à venir ;
- qui de l'évolution des prix d'ici 4/5 ans quand on voit ce qui vient de se passer les 4/5 dernières années. Il ne faut pas se placer dans une analyse statique.
On va pas refaire le débat, mais si vous êtes rassurés vous êtes forts.
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ReusableFan a écrit:J'ai bien peur que SX + BO soient des concurrents bien plus terribles qu'ILS à son époque, à l'horizon 2025.

Pourquoi ?

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ReusableFan a écrit:
Mustard a écrit:

tout a fait d accord, sauf que tu évoque seulement les developemet US. Ariane 6 a beau être techniquement un calque d Ariane 5 elles est industriellement révolutionnaire  (comparer a Ariane 5). Déjà que ariane 5 est concurrentiel  niveau prix que dire avec une fusee  entièrement refaite en pensant  au cout. Après niveaux flexibilité,  il faut voir la mutation de  outi industriels qui permet un aprovisionement continu,  Les modifications philosophique du ELA ainsi que l possibilité de mettre deux satellites  identique sous l coiffe se qui multiplie Les combinaisons  possible
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ReusableFan a écrit : l'Europe paiera cher de pas être à la pointe.

nikolai39 a répondu : Oui enfin bon, ne dramatisons pas. Arianespace a perdu un concurrent (ILS) pour un autre (SpaceX). Le premier, dans les années 1990, proposait des lancements 40% moins chers qu'Ariane. Le second propose des lancements 20 à 30% moins chers qu'Ariane. Nous ne sommes pas "hors jeu", nous sommes challengés. La nuance est importante.

Le retour d'un premier étage de F9 est, certes, impressionnant sur le plan visuel, mais dans les faits ce n'est "que" une baisse des coûts d'une trentaine de pourcents, grand maximum (selon Musk lui-même).


Cette analyse de Nikolaï39 s’appuie sur sa connaissance très étendue du secteur spatial, dont je profite depuis des années en passant de bons moments sur ce forum. Pourtant je ne partage pas du tout cette analyse, qui me paraît trop conditionnée par l’histoire du spatial au siècle dernier et qui sous-estime les deux éléments essentiels à prendre en compte pour fonder un pronostic dans le contexte actuel : d’une part, les ressorts profonds de la dynamique du New Space et d’autre part la radicalité des transformations du monde global de la fin des années 2010.
(N.B. Ce qui suit est à cheval entre le présent fil sur la FH et sur le fil « SpaceX, avenir, perspectives et opinions ». Je ne le place ici que parce que ce débat entre nikolai39 et ReusableFan a surgi ici, et je laisse le soin aux modérateurs de déplacer ce post s’ils le jugent nécessaire)
 
1 - Le New Space, dont SpaceX est une expression flamboyante  - mais qui est un processus comprenant beaucoup d’autres acteurs - signifie de manière schématique trois choses :

     les Etats, tout en demeurant essentiels pour la conquête spatiale,  tendent à ne plus être, là où le New Space a germé, que des points d’appui procurant aux initiatives venues du privé de puissants effets de levier ; on n’est plus dans un système de marchés publics, mais dans des partenariats public-privé, et cela paraît devoir encore fortement évoluer au bénéfice des entrepreneurs ; qu’est-ce qui structurera le plus l’avenir ? Le discours de ce personnage confus qu’est le président Trump en décembre  sur le « retour à la Lune » ? La présentation d’Elon Musk à Adelaïde sur le projet polyvalent du BFR ? L’intention de Jeff Bezos d’investir chaque année un milliard d’euros dans le spatial ? Les propos que Poutine tient de temps en temps sur la renaissance du spatial russe ? Les paris sont ouverts !
 

     ce ne sont pas les entreprises privées traditionnelles du spatial qui se sont émancipées ; la nouveauté, c’est qu’il y a eu de nouveaux entrants sur le marché du spatial ; nouvelle culture venue le plus souvent de l’univers informatique,  nouvelle vision, et un moral d’acier dans la réussite comme dans l’adversité ; une nouvelle génération sûre d’elle-même et confiante en l’avenir de ses projets ;
 

     ce moral d’acier a permis de forcer pour la première fois la barrière de la « rentabilisation de la réutilisation des systèmes spatiaux » ; il en fallait,  du courage et du culot, pour continuer et aller jusqu’à la victoire, là où les navettes spatiales américaine et russe, les projets Hermès et Baïkal, X33, HOTOL, Delta Clipper etc. avaient échoué ; Musk est allé jusqu’au bout, il a surmonté les échecs, et il a conduit sa société à une réussite, d’abord sur le plan purement technique, et maintenant,  semble-t-il, sur le plan du bilan financier  de la réutilisation ; l’histoire a montré, dans les guerres, les conflits sociaux, les explorations ou l’exploitation des grandes découvertes, que la dimension psychologique, les systèmes de représentation des acteurs sont essentiels ; le New Space, ce ne sont plus seulement de jeunes loups du spatial, ce sont des combattants relativement endurcis par les succès autant que par les échecs ; c’est cela que j’appelle les ressorts du processus ; où est l’élan, parmi les ingénieurs du spatial russe, ou parmi ceux du New Space américain et du New Space chinois qui pointe son nez ? Même si la Falcon Heavy ne vole jamais, même si SpaceX connaît des déboires techniques et un désastre financier, ils sont là, assez nombreux, les Jeff Bezos, Peter Beck ou Richard Branson et leurs émules chinois, prêts à prendre le relais, non par pour faire pareil, mais pour faire avancer tel ou tel aspect et finalement pour aller beaucoup plus loin, parce qu’un nouveau modèle industriel et de service est né ;
 

c’est pourquoi, sauf en cas de guerre ou d’effondrement financier planétaire, je suis convaincu que parce que cette barrière de la réutilisation rentable a cédé entre 2013 et 2017, d’autres barrières au progrès technologique dans le spatial vont également être renversées ; cela pourrait bien être comme l’histoire des progrès techniques dans l’industrie textile à la fin du XVIIIème et au début du XIXème siècle : des petits pas se succédant à un rythme rapide et qui mis bout à bout finiront par susciter une révolution industrielle spectaculaire ; c’est pourquoi je ne suis pas convaincu par l’argument de Nicolaï 39 sur une baisse de coûts de 30% ; car cela ne s’arrêtera pas là, cette baisse de coûts génère des marges, des marges qui vont permettre d’investir, de faire de l’investissement capacitaire qui va permettre à taux de rentabilité constant de dégager plus de cash, et simultanément ou successivement d’investir dans l’innovation disruptive, parce que celle-ci est dans les gènes du New Space ;
 

quant à l’argument sur le caractère spectaculaire des retours de la Falcon 9, qu’admet Nicolaï39, je me demande s’il ne faut pas distinguer ce qui relève de la publicité éphémère de ce qui va peut-être constituer un puissant mythe du nouveau siècle ; il faut creuser le sujet ; la fusée qui revient vers son usine de départ, c’est une fusée que l’on maîtrise comme un jouet, que l’on possède vraiment  en pensée, c’est une fusée comparable à un drone, ou à un objet de l’univers des jeux électroniques ; ce spectacle sculpte l’imaginaire collectif et les aspirations conscientes et inconscientes, pas simplement celles des internautes de ce forum, mais celles de millions de gens, notamment de très jeunes ; si de surcroît le pari très risqué de la FH, de ses trois étages revenant sur terre et sur mer, dans un ballet hypnotique, et de la voiture qui file vers l’infini réussit, ce ne sera pas simplement un coup de pub, ce sera à mon avis quelque chose de qualitativement plus puissant qui descendra au fond des consciences… ; ne sous-estimons pas la force du ludique pour fédérer les énergies dans les rêves, les études, puis dans le monde du travail ; reprenant la formule d’un poète anglais du début du XIXème siècle, Freud et Lacan ont dit « l’enfant est le père de l’homme » ; c’est à l’aune de cette formule que j’évalue l’enfantillage d’Elon Musk qui envoie sa belle voiture rouge en direction de Mars…
 


2 - La radicalité des transformations du monde global de la fin des années 2010 : c’est une erreur intellectuelle assez lourde (lire par exemple ce qu’écrit Edgar Morin sur les limites de la pensée cloisonnée) que de chercher à penser le futur du spatial en l’isolant de l’environnement global avec lequel il interagit. Le New Space lui-même n’est que l’un des sous-produits de la logique globale du monde d’aujourd’hui, marqué par l’atténuation de beaucoup de frontières, entre les Etats, entre les acteurs des secteurs économiques, entre les courants politiques … Aujourd’hui, plus personne ou presque ne veut rester à la place que les situations antérieures semblent lui assigner ; il en résulte un monde instable, parfois inquiétant, un monde où ce tourbillon des acteurs qui ne restent pas à leur place fait que tout devient possible, le pire mais aussi heureusement parfois le meilleur. Le Pape critique Rome, Macron secoue l’Europe, les Etats, municipalités et entreprises américaines se substituent à l’Etat fédéral américain dans la lutte contre le changement climatique. Fin de la parenthèse qui n’avait pour but que de dire de quoi ce monde est devenu capable.

Nous connaissons aujourd’hui une première vague du New Space, il y aura une deuxième vague, puis une troisième vague… Tout simplement parce que les acteurs adorent aujourd’hui changer de rôle. Et nous ne sommes plus dans le monde binaire des années 1960, il y a aussi les Chinois, les Indiens, et il y en a beaucoup d’autres. Une conséquence de la miniaturisation des satellites est de permettre à de jeunes pousses d’inventer des itinéraires de croissance plus progressifs, partant de très peu et pouvant aller assez loin. Regardons aussi ce que fait Peter Beck avec l’utilisation des imprimantes trois D dans la construction de fusées. Quand on essaye de faire de la prospective et que l’on considère  ce que fait Rocket Lab, il ne faut pas simplement se dire : jusqu’où ces gens-là peuvent-ils aller ? Mais : ce que ces gens essayent de faire, quel genre d’autres acteurs pourraient être capables de le faire peut-être plus vite, ou plus tard et mieux ? Et qu’est-ce qui va se passer quand tous ces gens seront dans la mêlée ?*

Alors oui, si nous restions dans le monde du XXème siècle, ce qu’il se passe aujourd’hui pourrait parfaitement être interprété comme le remplacement d’un concurrent d’Arianespace (ILS) par un autre concurrent (SpaceX). Mais voilà, l’histoire ne se répète pas, on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. Les références du passé sont utiles mais peuvent aussi parfois constituer des obstacles pour comprendre le présent et anticiper l’avenir. D’ailleurs,  cela a-t-il encore un sens de parler de manière intemporelle d’Arianespace alors que le rôle de cette entité n’est plus du tout le même dans l’organisation industrielle globale tout à fait nouvelle qui vient d’être mise en place pour Ariane 6 ? C’est tout cela qu’il faut essayer de penser, en même temps ! Les extrapolations linéaires à cadre général inchangé n’ont à mon sens guère de valeur.

Alors l’Europe, dans tout cela ? Patience, elle n’a pas dit son dernier mot. L’Europe a des gènes mêlés, avec par exemple un gène du « juste retour industriel », qui arrive à ses limites historiques, mais aussi un gène de la saine régulation des marchés concurrentiels et de l’ouverture économique sur des acteurs venus d’autres continents. Ce qui paraît impensable aujourd’hui sera peut-être possible dans trois au quatre ans parce qu’il y aura eu des événements, heureux ou tragiques, mais qui obligeront à faire évoluer le cadre lui-même. L’Histoire n’avance pas de manière linéaire, elle avance parfois à la façon d’un crabe, elle progresse par la périphérie, et toujours elle nous surprend, nous dérange, nous déconcerte, nous sidère. Il y aura des surprises, et elles ne viendront pas forcément de là où on les attend. Rien n’est écrit d’avance, mais il est bon de réfléchir à tout cela, car il y aura des opportunités et alors il faudra avoir les modes de pensée permettant de saisir ces opportunités très vite.

Si dans un mois la Falcon Heavy a explosé et rayé le LC39 de la carte, ce sera un coup dur, mais cela ne changera pas grand-chose à mon raisonnement. Pas de souci, le New Space a de la résilience et ce XXIème siècle tourbillonnant, s’il s’écarte par moment du spatial, ne pourra pas ne pas en faire finalement l’une de ses premières priorités.
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Tu défends bien ton idée générale PierredeSedna. Ton point de vue se lit bien, même si je ne partage pas ton sentiment de fond, que je crois être : le bonheur pragmatisme aidé par la globalisation et les idées ultralibérales feront le bonheur (de l'activité spatiale entre autre). En tous cas que j'aime ou pas, ton point de vue est intéressant.  :up8:
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Belle analyse de la situation. A l'image de tout ce que l'on fait aujourd'hui, l'astronautique avec un grand "A" se mondialise. Il fadra donc passer par là aussi.
Je rajouterais que le futur marché des satellites fera encore évoluer la situation: gros, moyens, petits, micros, nanos, Cube et plein d'autres à inventer changeront la donne d'ici 10-15 ou 30 ans avec de nouveaux acteurs et une nouvelle façon de travailler.

Merci pour cette analyse.
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Astro-notes a écrit:Tu défends bien ton idée générale PierredeSedna. Ton point de vue se lit bien, même si je ne partage pas ton sentiment de fond, que je crois être : le bonheur pragmatisme aidé par la globalisation et les idées ultralibérales feront le bonheur (de l'activité spatiale entre autre). En tous cas que j'aime ou pas, ton point de vue est intéressant.  :up8:

Oui merci Pierre de prendre le temps de structurer un avis, que je partage assez largement (on s'en sera douté).

Sur ta conclusion : oui je pense que l'Europe a sa carte à jouer, avec ses spécificités qui sont aussi ses forces. Airbus Group prouve précisément qu'on peut y arriver malgré les contraintes industrialo-politiques. Car nous avons un capital humain exceptionnel. 

Le plus grand déficit actuel est du côté des pouvoirs publics, qui ne jouent pas leur rôle. N'oublions pas, en effet, que le New Space n'est pas un hasard : certes, il est rendu possible par les initiatives privées issues elles-mêmes de la tech en bonne partie : mais l'action de la NASA a été décisive, avec le "NASA Authorization Act of 2005" puis la création du  Commercial Crew & Cargo Program Office (C3PO) en novembre 2005. Et avec le soutien du Congrès bien sûr, qui a donné les budgets avec l'objectif de restaurer la compétitivité américaine et son accès souverain à l'espace (y compris pour le vol habité). De même, l'initiative de Trump sur la lune paraît bien creuse mais au moins a-t-elle le mérite de donner une direction et un élan au plus haut niveau.

En Europe et notamment en France, on sent bien que le sujet spatial n'est pas porté au plus haut niveau, mais "géré" par des responsables spatiaux publics (agences) et des industriels, sans impulsion majeure des dirigeants politiques nationaux (chefs d'Etat et de gouvernement) et européens (institutions européennes). 

Et pourquoi les pouvoirs publics et notamment les dirigeants ne jouent-ils pas leur rôle en Europe ? Sujet complexe, mais je vois plusieurs raisons dont :

  • une incompréhension des enjeux futurs. Nos dirigeants n'ont pas encore compris ce qui se joue "là-haut" ;
  • une surévaluation de place actuelle de l'Europe : la "première place" d'Arianespace (en fait très relative car les lancements commerciaux sont secondaires en volume ; et surtout sur le point d'être perdue dès cette année sur ce segment) fait croire que tout va bien ou en tous cas est "géré" (Ariane 6 arrive, ne vous en faites pas) ; de même, le "paradoxe Pesquet" nous fait croire qu'on est au premier rang des puissances spatiales, alors que le US avec leur programme Commercial Crew et Orion vont dès 2018 creuser un écart (très) significatif  [je précise que je suis un fan de Pesquet];
  • un moindre intérêt pour le spatial des citoyens eux-mêmes, qui ne met pas une pression suffisante sur le politique. Certes, c'est en train de changer essentiemment du fait des succès de SX, mais trop lentement encore.


Or, si nous-mêmes fans de l'espace ne sommes pas ambitieux et en même temps inquiets de l'évolution actuelle, qui le sera ? Il faut s'organiser et pousser dans le sens de l'ambition pour l'Europe (et la France). On est dans une période charnière. Pourra-t-on rattraper si l'on s'y prend dans 10 ans ? Rien n'est moins sûr (cf. le GAFA).
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ReusableFan

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Avec PierredeSedna, c’est le retour de la rhétorique qui nous manque tant avec les procédés affligeants des interviews médiatiques et des procédés délétères qui consistent à couper sans cesse l’interviewé pour l’empêcher de développer ses idées. Les forums sur le net permettront - ils de renouer avec cette tradition du discours ?
En tout cas bravo à PierredeSedna que l’on partage ou pas toutes ses idées ! bravo
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Giwa
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Je "plussois" aux propos de Giwa.  :up8:
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ReusableFan a écrit : Et de grands changements sont nécessaires si on veut rester dans la course.

Space Opera a répondu : Il est là le principe de base: tu y vois une course. D'autres n'en voient pas.


S'il n'y a pas de course, il n'y a pas besoin de bouleversement.

Mon opinion perso est quelque part entre les deux, mais je ne dirais pas personnellement qu'il y a une course. SpaceX peut rafler 100% du marché commercial et aller vers Mars pour 2€/vol, ça n'en fait pas une course pour autant. La course est dans la tête des gens, elle n'est pas factuelle, contrairement aux années 60. Puisqu'il s'agit d'une fonction quasi-régalienne et de souveraineté, la comparaison de l'institut Montaigne avec les GAFA me semble très inapproprié. Il s'agit d'un secteur qui ne sera pas laissé à la libre concurrence, les lois du marché ne fonctionnent pas dans les lanceurs. Et des lancements à 10 centimes par SpaceX ne changeraient rien à ça.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas réagir (mais réagir à quoi précisément à part "faire moins cher" ?), je dis qu'il ne faut pas mélanger ce qu'il se passe avec ce qui passe de façon plus classique dans des secteurs marchands.

Les mots sont des outils pour exprimer des idées, mais ils peuvent aussi nous piéger quand ils sont connotés. Ici, c’est le mot « course » qui me semble gêner la réflexion.

Je partage un peu la première réaction de Space Opéra, quand il s’abstient de se prononcer sur le point de savoir s’il y a une nouvelle course à l’espace ou s’il n’y en a pas, et qu’il écrit que la réalité est quelque part entre ces deux interprétations. Il me semble en effet pour ma part que le réalité est ailleurs. En revanche, je sens dans la suite du propos de Space Opéra, et dans ses autres posts, une conviction selon laquelle la dimension quasi-régalienne de l’activité spatiale est une garantie de survie minimale pour le spatial européen tel qu’il fonctionne aujourd’hui. Or j’ai un doute sur ce point, et je suis plutôt de l’avis de ReusableFan quand il dit que l’espace européen doit se remettre en question et adopter une stratégie offensive sur le réutilisable.

1 - Comment caractériser l’évolution du spatial aujourd’hui ? Est-ce une course ? Ou le secteur spatial mondial est-il structuré par des rapports de force et des jeux d’intérêt générateurs d’une relative stabilité dans la durée entre les acteurs ? Ou faut-il analyser les choses d’une manière complètement différente ?

Quand on dit course, on pense inévitablement à la course à l’espace des années 1957-1972 entre les Américains et les Soviétiques. Le moteur de cette course était à 100% régalien, même si des intérêts privés en ont profité. L’argent public coulait à flot. Les dépenses évoluaient de manière exponentielle. Tels les Horaces et les Curiaces  de la tragédie de Corneille, les astronautes américains et les cosmonautes russes s’affrontaient dans une compétition pacifique et symbolique pour éviter les horreurs d’une guerre totale entre les deux blocs opposés par leurs intérêts de puissance et leurs idéologies. Certains feront valoir de manière négative que l’espace n’était qu’un prolongement du militaire, et que la plupart des satellites de l’époque travaillaient pour les armées, ce qui n’est évidemment pas faux sur le plan factuel, mais je suis plutôt d’avis qu’en détournant les tensions belliqueuses vers un projet au service du progrès général, la conquête spatiale des années 1960, en plus d’assurer notre survie, a aussi sauvé l’honneur de l’humanité.

Les fruits de cette victoire de la raison sur la folie, nous les avons récoltés en 1975, avec le 1er vol spatial commun entre Américains et Soviétiques, puis après la fin de la guerre froide avec le programme Shuttle-Mir et bien sûr la construction et l’exploitation de l’ISS ; et avec la coopération spatiale internationale généralisée pour les missions scientifiques, allant de pair avec la mise en place d’une concurrence commerciale entre les lanceurs pour l’accès à l’orbite basse et l’orbite géostationnaire.

Je souhaite évoquer un souvenir personnel. C’était en juillet 1969, j’avais dix ans, Apollo XI était en route vers la Lune. Subitement, une nouvelle tombe, les Russes viennent à leur tour d’envoyer un engin vers la Lune. Il s’agissait, bien sûr, de Luna 15. Mais vous n’imaginez pas la panique sur les ondes pendant quelques heures. C’est une mission inhabitée, précisait la radio, dont certains commentateurs laissaient aussi entendre que ce robot mystérieux et menaçant des Soviétiques allait peut-être au dernier moment empêcher par la force les Américains de poser les premiers le pied sur le sol lunaire. Rapides mises au points, tant côté américain que côté soviétique : non, les trajectoires ne se croisent pas et chacun agira de son côté. Que le meilleur gagne ! Armstrong et Aldrin marchent sur la Lune, depuis leur « base de la sérénité ». Luna 15 s’écrase dans la mer des Crises, mais tout simplement parce que la technologie soviétique n’était pas encore au point. Ouf ! Happy end.

On est donc passé d’une course à l’espace ambiguë, fille de l’hystérie guerrière mais prenant subitement un sens pacifique, à une activité spatiale sereine développée par des acteurs qui cohabitent et s’entraident, qui jouent de leurs complémentarités, qui se font certes des vacheries commerciales parfois mais qui ne cherchent jamais à détruire l’autre. Ces acteurs ne sont pas de même taille, il y a la cour des grands, celle des moyens et celle des petits, mais chacun est assuré de sa place. Stabilité géopolitique entre les grands de ce monde et en cohérence avec cela, stabilité du paysage des acteurs de la conquête spatiale. C’est un acquis de civilisation.

Cela, c’est la phase 2. Mais pour le meilleur et pour le pire, dans cette histoire, il y a aussi une phase 3. Je comprends qu’il soit difficile de faire son deuil de cette phase 2 venue après ces années soixante anxiogènes au plan international et leur heureux dénouement. Mais il faut regarder la réalité d’aujourd’hui en face. Certes, ce n’est pas le retour à la case départ du risque de destruction par la guerre. Le danger, c’est la destruction, la destruction totale,  par l’obsolescence.

Face à ce défi du risque d’obsolescence technique, il est à mon sens vain de se rassurer en se disant que quoique l’on fasse, quoique l’on s’abstienne de faire, jamais les Etats européens ne renonceront à un socle d’activité spatiale garantissant leur souveraineté. Mais pour fonder une opinion sur ce point, ce n’est pas seulement du côté du secteur spatial, de son histoire, de son fonctionnement interne aujourd’hui qu’il faut regarder, c’est du côté des Etats, et tout d’abord de celui de la France. Comment va l’Etat aujourd’hui, que peut-il, que veut-il, quelle est sa stratégie ? Pour faire un pronostic sur l’avenir du spatial français et européen, il ne faut pas seulement regarder ce qu’il y a ou ce qu’il n’y a pas sous les jupes d’Ariane 6, il faut être attentif à l’actualité de l’Etat dans son ensemble. Or, cette actualité, c’est le programme Action Publique 2022, qui dans un contexte budgétaire fortement contraint, envisage une revue des politiques publiques. Vous allez me dire : ce n’est pas la première revue des politiques publiques. Oui, mais cette fois, si vous regardez bien les documents en ligne, c’est différent. Il est envisagé d’abandonner complètement certaines politiques publiques. Et aussi d’en adopter de nouvelles. Et d’y mettre les moyens ! D’énormes économies peuvent ainsi gager des dépenses ambitieuses. Jamais l’Etat n’aura été aussi flexible. De toute façon, il n’a pas le choix.

Bien entendu, pour le moment, Action Publique 2022 ne dit rien sur le spatial. C’est en juillet 2018 que les hauts arbitrages seront rendus, ce calendrier est public.  Et peut-être n’y aura-t‑il rien concernant le spatial. Peut-être les décisions concernant le spatial seront-elles reportées de deux à trois ans. Mais l’Etat aura appris à fonctionner différemment, et il aura repris de la vigueur, ce qui sera forcément bon potentiellement pour le spatial.

Oui, Space Opéra, il n’y a pas que les lois du marché qui façonnent l’avenir des lanceurs. Mais que l’on ne s’y trompe pas : si les lois du marché sont parfois implacables, les lois actuelles du fonctionnement de la sphère publique ne le sont pas moins.

A la base, le bouleversement technologique que représente le réutilisable vient du jeu du marché. Mais il ne faut pas croire que la sphère publique est protégée du jeu du marché par une muraille de Chine. Elle est tenue par des digues, mais ces digues ne tiennent que par de faibles vents.

La course à l’espace des années 60 n’a au fond eu ni vainqueur ni vaincu. Les Américains ont eu la Lune, mais ils n’ont pas su la garder. Les Soviétiques n’ont eu qu’une station spatiale permanente, mais ils ont su la conserver et l’offrir au monde. La transformation du secteur spatial qui s’amorce sera beaucoup plus violente. Il y aura des vainqueurs, tandis que des sociétés privées et des agences publiques seront anéanties.

Au soir du 14 juillet 1789, Louis XVI interrogeait naïvement La Rochefoucauld : « C’est une révolte ? » Et La Rochefoucauld de répondre : « Non Sire, c’est une révolution. »
Aujourd’hui, nous nous interrogeons : est-ce une nouvelle course à l’espace ?
Eh bien non mes amis du Forum. C’est une transformation !
Cela ne doit pas pour autant nous rassurer.

 
2 – Il faut  construire dans la durée un projet européen pour le réutilisable.

Ce n’est pas en proposant aux pouvoirs publics un « scénario à l’Albanaise » (par référence à l’Albanie de l’époque d’Enver Hodja, dont le slogan était « compter sur ses propres forces » alors que ce pays était misérable) que les acteurs du monde spatial obtiendront de Matignon des arbitrages favorables.

Réveillons-nous : Falcon Heavy s’envole dans quinze jours et si elle explose (ce que personne ne doit souhaiter) on n’aura gagné que dix mois. Falcon 9 ne concurrence que marginalement Ariane mais Falcon Heavy proposera des solutions à terme économiques pour tous les types de satellisation que permet Ariane. Et ensuite, il y aura la New Glenn de Blue Origin en 2020. Ce qui signifie que pour ne pas dépendre d’un seul fournisseur de services de lancement, SpaceX, les exploitants de satellites auront une alternative autre que celle que propose Ariane. Cette nouvelle alternative sera plus économique, de plus en plus. Et très vite, les offres très économiques se multiplieront.

Si on propose dans les mois qui viennent à Matignon des scénarios petit bras, il y aura trois ou cinq ans plus tard dans les cabinets ministériels des gars qui feront des calculs de coin de table et qui diront que finalement, il vaut mieux, pour satelliser nos charges régaliennes, s’en remettre au jeu du marché entre SpaceX, Blue Origin, les Russes, les Indiens et quelques autres plutôt que de continuer à financer une filière ruineuse qui plombe les finances de l’Etat.

Certains donneront alors leur lecture actualisée de l’épisode de « l’humiliation Symphonie » (premier satellite européen de communication, qui du fait de l’échec du programme de fusées Europa, fut lancé en 1974 par une Thor Delta américaine, mais à la stricte condition d’une interdiction d’utilisation commerciale !) en disant que dans un monde multipolaire, les acteurs, et notamment les acteurs spatiaux, sont suffisamment nombreux pour que l’on ne se retrouve pas confrontés à de tels diktats. C’est comme ça que l’on changera de paradigme et ce sera la mort de l’Europe spatiale. Mais je suis convaincu que l’on n’en arrivera pas là, si l’on adopte la  bonne stratégie.

J’ai bien lu le dernier message de ReusableFan qui analyse l’état d’esprit des dirigeants et de la société. Je suis peut-être un peu plus optimiste que lui sur la capacité de nos responsables à comprendre les enjeux du spatial et à adopter une approche qui soit à la hauteur. Mais cela, à la condition que nous soyons capables de leur expliquer comme il faut les tenants et aboutissants.

Certains de mes propos peuvent prêter à confusion, mais je ne suis pas un ultralibéral comme le suggère Astronotes. Je crois certes que l’économie de marché rend possible les innovations, mais à condition d’être régulée par les Etats. Ceux-ci, compte tenu de leurs modes de fonctionnement, sont incapables de fixer des programmes à l’horizon des quinze ou prochaines années. Mais ils peuvent créer un contexte permettant que des acteurs privés puissent lancer et faire aboutir de tels programmes. Rappelons-nous, sans les réformes spatiales (pourtant décriées) d’Obama, jamais Musk n’aurait pu faire ce qu’il a fait. Sans le cadre juridique du partenariat public – privé, même un acteur tel que Blue Origin  avec ses milliards de dollars aura du mal à faire aboutir au moins une partie de ses projets.

Ce qui importe, c’est la volonté humaine, c’est l’union des hommes de bonne volonté, qu’ils soient entrepreneurs, ingénieurs, politiques, chercheurs ou simple citoyens, pour avancer vers des visions partagées sur ce qu’il faut entreprendre, pour convaincre et finalement pour accomplir.

A mon avis, la question aujourd’hui n’est pas de savoir si la France et l’Europe doivent adopter une stratégie offensive sur le réutilisable, mais de savoir quand et comment elles doivent le faire, compte tenu de la nécessité de maintenir l’étape Ariane 6 et de l’articuler avec une étape réutilisable venant assez rapidement.

Soyons clairs : l’Europe spatiale de 2030 sera basée sur l’utilisation de lanceurs réutilisables, ou elle ne sera alors plus qu’un souvenir dans la mémoire de forumeurs aux tempes blanchies. Tous, ici, nous ne voulons pas de cela. 
 
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