[sondage] En sortie extra-véhiculaire, quel sentiment vous dominerait ?
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[sondage] En sortie extra-véhiculaire, quel sentiment vous dominerait ?
Pas tout à fait d'accord :sage: .
Il faut à mon sens (et pas que pour l'espace : demandez à next-step-to-mars ce qu'il fait dans son quotidien) distinguer les problèmes liés 1) au matériel et 2) ceux liés à la mission/environnement hostile.
Même si au niveau professionnel on évacue tout de suite de la discussion les problèmes de panique voire de sujets peureux (encore que...), chaque type de problème va apporter son lot "d'appréhension". Gouverner c'est prévoir et le meilleur moyen de ne pas avoir d'emm...dements c'est de les prévoir et de tout faire pour les éviter. Mais autant on peut limiter les risques de tuiles matérielles, autant par définition un milieu hostile est ... hostile. En d'autres termes et pour reprendre l'exemple d'Argyre, j'ai moi aussi pas mal plongé (niveau 4, des profondes, du lac boueux, un peu de spéléo) mais honnétement je ne garantirais pas que plonger sous la banquise ne m'apportarait pas mon lot de stress tout simplement parce qu'un pro doit penser à toutes les complications envisageables et que ça crée une petite appréhension sourde et continue.
L'entrainement et la qualité de tes acolytes fait effectivement qu'après une courte période de mise en route tu trouves la confiance en ton matériel mais si tu souhaites vivre vieux il faut s'affranchir du matériel pour prévoir les ennuis liés au terrain ou à la mission (genre serrac de 50 tonnes qui tombe sur ton meilleur profil à la vitesse racine-de-deux-g-h, ne pas trouver la sortie de ton lac gelé, perdre ton fil d'Ariane dans ce foutu lac boueux...).
Donc l'entrainement EVA en piscine, permet de bien connaitre son matos pour diminuer cette première source de stress, les sas c'est encore rattaché à un espace connu (quoique j'aimerais bien voir la fréquence cardiaque des primo-EVAistes dans les différentes phases de la sortie), et après c'est l'inconnu car même préparée une mission comporte toujours des inconnues et le Principe de la Tartine Beurrée est là pour te le rappeler. Si ça n'était pas le cas, on enverrait des robots. Le petit plus de l'humain a son prix : c'est le stress.
Il faut à mon sens (et pas que pour l'espace : demandez à next-step-to-mars ce qu'il fait dans son quotidien) distinguer les problèmes liés 1) au matériel et 2) ceux liés à la mission/environnement hostile.
Même si au niveau professionnel on évacue tout de suite de la discussion les problèmes de panique voire de sujets peureux (encore que...), chaque type de problème va apporter son lot "d'appréhension". Gouverner c'est prévoir et le meilleur moyen de ne pas avoir d'emm...dements c'est de les prévoir et de tout faire pour les éviter. Mais autant on peut limiter les risques de tuiles matérielles, autant par définition un milieu hostile est ... hostile. En d'autres termes et pour reprendre l'exemple d'Argyre, j'ai moi aussi pas mal plongé (niveau 4, des profondes, du lac boueux, un peu de spéléo) mais honnétement je ne garantirais pas que plonger sous la banquise ne m'apportarait pas mon lot de stress tout simplement parce qu'un pro doit penser à toutes les complications envisageables et que ça crée une petite appréhension sourde et continue.
L'entrainement et la qualité de tes acolytes fait effectivement qu'après une courte période de mise en route tu trouves la confiance en ton matériel mais si tu souhaites vivre vieux il faut s'affranchir du matériel pour prévoir les ennuis liés au terrain ou à la mission (genre serrac de 50 tonnes qui tombe sur ton meilleur profil à la vitesse racine-de-deux-g-h, ne pas trouver la sortie de ton lac gelé, perdre ton fil d'Ariane dans ce foutu lac boueux...).
Donc l'entrainement EVA en piscine, permet de bien connaitre son matos pour diminuer cette première source de stress, les sas c'est encore rattaché à un espace connu (quoique j'aimerais bien voir la fréquence cardiaque des primo-EVAistes dans les différentes phases de la sortie), et après c'est l'inconnu car même préparée une mission comporte toujours des inconnues et le Principe de la Tartine Beurrée est là pour te le rappeler. Si ça n'était pas le cas, on enverrait des robots. Le petit plus de l'humain a son prix : c'est le stress.
bibi- Messages : 142
Inscrit le : 07/08/2008
C'est vrai que ce sondage est vraiment "très imaginaire " car même pour des " touristes " ils ne feraient pas d'EVA sans un bon entraînement préalable et quant-même une sélection qui ne dépendrait pas exclusivement du porte-monnaie ou plutôt du chéquier (on ne peut pas imaginer de faire faire une EVA à quelqu'un de très angoissé et qui paniquerait très facilement) . De plus on ne peut pas être mis en situation brutalement et c'est vrai comme le dit Argyre , que comme pour la plongée sous-marine, le fait de s'équiper vous met en situation progressivement ( qui prend d’ailleurs bien plus de temps sauf pour les plongeurs professionnels des grands fonds utilisant l’héliox voire l’hydrox, mais eux il y a longtemps qu’ils sont aguerris) . Malgré tout lors des ″baptêmes″ de plongée certains ont quant-même quelques difficultés à rester calmes, mais ce sont souvent des adultes qui se sont mis ″à l ‘eau ″ sur le tard. Toutefois même quand on a un peu d ‘habitude, on se sent un peu moins à l’aise devant un grand espace ″ vide ″ si le fond marin est très profond et hors de visibilité ou dans une eau très turbide où parfois on ne distingue plus rien de net à moins de un à deux mètres. C’est pourquoi la vision de la Terre doit être psychologiquement un élément rassurant . Je me demande d’ailleurs comment en microgravité les spationautes se reconstruisent un référentiel ;la gauche et la droite restent ,ainsi que l’avant et l’arrière, mais est-ce qu’ils remplacent le haut par la tête et le bas par leurs pieds ? Toujours est-il que l’impression de ″chute ″ (qui préexiste , il faut le répéter à l’EVA) ne les ″conduit ″ mentalement dans aucune direction et sens particuliers. Alors cela me paraît difficile que l’on puisse avoir le sentiment de risquer de se précipiter vers la Terre. Cela ne doit pas être du tout le même cas lors d’un premier saut en parachute où tant que les pieds sont encore sur le plancher de l’avion on sait très bien où est le bas :affraid: …Comme je comprends Spacemen 1969 ! :)
Cordialement,
Giwa
PS: en tout cas je peux vous garantir que si j'étais dans la situation très fictive d'être " condamner "à choisir entre une EVA ou le grand saut de Michel Fournier, je choisirais l'EVA.
Cordialement,
Giwa
PS: en tout cas je peux vous garantir que si j'étais dans la situation très fictive d'être " condamner "à choisir entre une EVA ou le grand saut de Michel Fournier, je choisirais l'EVA.
Giwa- Donateur
- Messages : 12848
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Bonjour!
En ce qui me concerne, c'est un peu des deux! :roll:
L'exaltation de ne plus vraiment faire partie de la station, mais devnir un "objet" en orbite (même si je suis tourjous attaché. :cheers:
Cependant, un peu peur! Même si je ne suis pas en proi au vertige, n'avoir comme seul repère que la station! Pas de "plafond" ni même de "fond" comme on pourrais en avoir dans de l'eau par exemple! :pale:
En ce qui me concerne, c'est un peu des deux! :roll:
L'exaltation de ne plus vraiment faire partie de la station, mais devnir un "objet" en orbite (même si je suis tourjous attaché. :cheers:
Cependant, un peu peur! Même si je ne suis pas en proi au vertige, n'avoir comme seul repère que la station! Pas de "plafond" ni même de "fond" comme on pourrais en avoir dans de l'eau par exemple! :pale:
ursamajor- Messages : 43
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Localisation : Lyon
J'en profite pour poser une triple question au passage (à peine hors-sujet mais s'cusez moi quand même) :
Savez-vous :
- par quel sas s'effectuent en règle générale les EVA depuis l'ISS ?
- où s'habillent les scaphandriers ? Dans un module, un noeud ou le sas ?
- où sont stockés les scaphandres ?
J'imagine que les réponses doivent se trouver assez facilement sur le Net mais, si quelqu'un sait ça par coeur, ça lui permettra de briller et de me faire gagner un peu de temps !)
:roll:
Alors, qui sera le plus rapide (j'ai vu qui était connecté et ai ma petite idée) ?
D'avance merci
Savez-vous :
- par quel sas s'effectuent en règle générale les EVA depuis l'ISS ?
- où s'habillent les scaphandriers ? Dans un module, un noeud ou le sas ?
- où sont stockés les scaphandres ?
J'imagine que les réponses doivent se trouver assez facilement sur le Net mais, si quelqu'un sait ça par coeur, ça lui permettra de briller et de me faire gagner un peu de temps !)
:roll:
Alors, qui sera le plus rapide (j'ai vu qui était connecté et ai ma petite idée) ?
D'avance merci
Le Quest Joint Airlock te vas ? Il a été amené à l'ISS par STS-104
Il y a 2 parties dans l'Airlock : 1 pour les scaphandres et un pour l'habillage
Materiau : aluminium
Longueur : 5.5 m
Diametre : 4 m
Pods : 6,064 kg
Volume / Surface : 34 m³
Regardes là : http://spaceflight.nasa.gov/station/eva/outside.html
Il y a 2 parties dans l'Airlock : 1 pour les scaphandres et un pour l'habillage
Materiau : aluminium
Longueur : 5.5 m
Diametre : 4 m
Pods : 6,064 kg
Volume / Surface : 34 m³
Regardes là : http://spaceflight.nasa.gov/station/eva/outside.html
Invité- Invité
spacemen1969 a écrit:Le Quest Joint Airlock te vas ?
Attention, valable seulement pour les sorties en scaphandre US.
Lorsque c'est les scaphandres russes qui sont utilisés, la sortie se fait par le sas PIRS, situé au nadir de Zvezda.
mic8 a écrit:spacemen1969 a écrit:Le Quest Joint Airlock te vas ?
Attention, valable seulement pour les sorties en scaphandre US.
Lorsque c'est les scaphandres russes qui sont utilisés, la sortie se fait par le sas PIRS, situé au nadir de Zvezda.
Tout à fait, je pensais que PIF ne cherchait que le côté US, mais en fait je pense que c'est moi qui me suis orienté volontairement du coté US :suspect:
J'ajoute que le Quest Joint Airlock est sur Unity Node 1 (j'espère ne pas me planter, je le fais de tête et je ne connias pas par coeur tous les éléments ISS :megalol: )
Voici une photo du Quest Joint Airlock lors de son arrivée sur l'ISS lors de STS-104 (Juillet 2001) et une vue de l'ISS avec le QJA au départ de STS-104
Invité- Invité
Oui tout à fait! Il est bien accroché à Unity, du "côté" droit! Sur la photo de droite de spacemen1969, on le voit clairement sous l'extremité du bras robotique. A noter que la plupart des EVAs se font à partir de ce sas (je ne sais plus le pourcentage exact).
:affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid: :affraid:spacemen1969 a écrit:J'ajoute que le Quest Joint Airlock est sur Unity Node 1 (j'espère ne pas me planter, je le fais de tête et je ne connais pas par cœur tous les éléments ISS :megalol: )
La honte !!
Les deux, et sans doute très fortement.
La peur, parceque c'est vraiment un truc inconcevable pour l'esprit tant q'on ne l'a pas vécu.
L'exaltation parceque la vue doit être, waow......
La peur, parceque c'est vraiment un truc inconcevable pour l'esprit tant q'on ne l'a pas vécu.
L'exaltation parceque la vue doit être, waow......
el_slapper- Messages : 507
Inscrit le : 06/08/2008
Age : 48
Localisation : damned, je suis localisé
Et les Européens, alors ? Ils ont le droit de sortir en EVA ou pas ?
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Argyre
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Argyre- Messages : 3397
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Seulement s'ils ont étés sage :cadeauesa:Argyre a écrit:Et les Européens, alors ? Ils ont le droit de sortir en EVA ou pas ?
Ce n'est pas la nationalité de la personne qui est dans le scaphandre qui est importante (enfin, d'un point de vue technique), mais le type de scaphandre utilisé.
Chaque type de scaphandre a besoin de son matériel adapté pour le préparer avant la sortie et le remiser après. C'est en ce sens qu'il y a un sas spécifique pour les deux types de scaphandres utilisés à bord de la station.
Bon, après avoir un peu fait dans le hors sujet, je vous ai retrouvé ce texte de Jean-Pierre Haigneré qui répondra peut-être à certaines interrogations formulées plus haut...
Le Figaro du 27 avril 1999
MARCHER DANS L’ESPACE SUBLIME ET HOSTILE
Ma première sortie dans l’espace a été un grand moment de ma vie professionnelle et restera un moment inoubliable de ma vie tout court. J’ai tenu à prendre une semaine de recul pour vous en parler avec plus de sérénité. Ce vendredi 16 avril, tout a commencé très tôt le matin. Nous vivons ici au rythme de la balistique qui détermine en particulier les heures de passage au-dessus du centre de contrôle de Korolev. Notre satellite relais étant en panne, il fallait rechercher les meilleures zones de visibilité radio pour le contrôle étroit de ces opérations délicates.
Levé à 1 h 20 à l’heure d’hiver de Moscou, petit déjeuner rapide et inévitable visite médicale par télémétrie interposée. Sergueï Avdeiev a fait les derniers préparatifs de la station. Viktor Afanassiev et moi enfilons nos vêtements spatiaux. Tout se déroule en silence, chacun sait ce qu’il a à faire et le fait sans se poser de questions. La tension est malgré tout sensible, tout rappelle l’ambiance qui précède les combats.
w 5 h 35 : Sergueï referme la porte du sas côté station derrière lui. Commence alors le long processus des vérifications de l’étanchéité des diverses portes, scaphandres et instruments, et la désasturation à l’oxygène pour éviter les bulles d’azote dans le sang.
w 6 h 45 : Les choses sérieuses commencent pour moi, je dois préparer, puis ouvrir la porte du sas. Comme elle n’est plus étanche, il faut patiemment dévisser un à un les 12 écrous supplémentaires qui la retiennent (elle s’ouvre vers l’extérieur). Le scaphandre déjà gonflé résiste à chaque mouvement, nous sommes déjà dans le vide et toujours en impesanteur, les appuis sont difficiles à trouver, surtout ne pas s’épuiser dès le début.
w 7 h 35 : Alors que vous allons franchir les côtes africaines, j’ouvre enfin l’écoutille avec précaution. Je connais l’histoire de Nicolas Boudarine, littéralement éjecté avec la porte hors du sas pour ne pas avoir suffisamment attendu que tout l’air s’échappe. Bien sûr je pense à lui au moment où je tourne le volant de la porte et je vérifie mes attaches. Mais elles ne pèseraient pas lourd si la différence de pression était trop forte. C’est comme si j’avais ouvert la gueule d’un monstre. D’abord un énorme flash qui ne s’arrête pas et des milliers de particules brillantes qui s’échappent du sas en virevoltant. Le soleil est très bas sur l’horizon à l’ouest et nous lui faisons exactement face. Juste le temps de baisser ma visière dorée avant d’être complètement aveuglé. Est-ce cela que l’on appelle le baptême du feu ? Il me faut de longues secondes avant de pouvoir à nouveau distinguer les formes de cet étrange univers. Je m’enhardis et décide de regarder sous moi. Malgré l’obscurité, je vois la Terre défiler à une vitesse étonnante.
Quelques lumières scintillent en bas, les Africains sont chez eux peut-être en train de regarder la télé. Entre eux et moi, le vide intégral ; tout autour, des espaces gigantesques. Longues séquence de grandes sensations.
Viktor derrière moi commence à s’agiter en grommelant à voix basse comme à son habitude. Je me ressaisis rapidement. Je ne suis pas décidé à me laisser intimider tout de suite. Il y a encore trop de chemin à faire. Mais Dieu que c’est impressionnant ! J’attache solidement les deux crochets à l’extérieur et je saute dehors sans réfléchir, mais en essayant de restituer avec précision les gestes appris à l’entraînement. Malgré la sécurité du crochet, mes mains torturées par les gants du scaphandre se crispent sur les mains courantes. Pourtant, il me faut bien les relâcher pour attraper tout le matériel que Viktor sort du sas et pour le fixer à l’extérieur sur les mains courantes. Ne pas fâcher les deux mains, ne pas laisser s’échapper une de ces précieuses expériences, telles sont mes obsessions les premières minutes de mon EVA, et ces maudites mains me font déjà mal.
Alors que nous avons perdu le contact radio avec le sol, nous décidas malgré tout de réaliser l’étape suivante toute proche. Nous devons récupérer l’expérience française Comet installée au mois d’octobre par Sergueï Avdeiev et Guenadi Padalka. C’est une espèce de filet à papillons sophistiqué qui capture les poussières éjectées par les comètes quand elles se rapprochent du Soleil, comme les Léonides en novembre. Nous installons aussi l’expérience exobiologie qui consiste à exposer à l’environnement spatial des acides aminés, constituants primaires des cellules vivantes. Si les dégradations observées sur les chaînes complexes sont graves et irréversibles, on pourra en conclure que la vie ne peut pas provenir du cosmos comme certains l’affirment.
La Terre en-dessous
C’est justement à la vie et à la Terre que je pense en ce moment précis, perché au sommet de Strela : il s’agit d’une poutre articulée à sa base. Depuis cet endroit, Viktor la commande avec des manivelles, pour amener l’autre extrémité libre sur laquelle je me trouve vers la poutre Saphora. Je m’accroche comme je peux à ce frêle esquif qui branle comme un cocotier avec tous nos équipements en vol presque libre autour de moi. De là , je domine la situation, la station Mir 20 mètres sous moi et la Terre encore en dessous. Par un signe du destin, nous survolons à ce moment précis la chaîne de l’Himalaya et je crois reconnaître l’Everest à travers les nuages. 400 kilomètres au-dessous du toit du monde, je commence à prendre confiance, car il n’y a pas d’autre choix dans de telles circonstances. Avec mon seul scaphandre comme protection contre ce milieu sublimement beau et terriblement hostile, je regarde l’Asie 600 kilomètres autour de moi, j’ai dans les yeux l’image de cette armée chinoise enterrée avec son empereur ; caparaçonné dans mon armure moderne, je me sens un peu un de ces chevaliers, montant la garde sur la frontière lointaine et provisoire de notre vieux monde.
Le Figaro du 27 avril 1999
MARCHER DANS L’ESPACE SUBLIME ET HOSTILE
Ma première sortie dans l’espace a été un grand moment de ma vie professionnelle et restera un moment inoubliable de ma vie tout court. J’ai tenu à prendre une semaine de recul pour vous en parler avec plus de sérénité. Ce vendredi 16 avril, tout a commencé très tôt le matin. Nous vivons ici au rythme de la balistique qui détermine en particulier les heures de passage au-dessus du centre de contrôle de Korolev. Notre satellite relais étant en panne, il fallait rechercher les meilleures zones de visibilité radio pour le contrôle étroit de ces opérations délicates.
Levé à 1 h 20 à l’heure d’hiver de Moscou, petit déjeuner rapide et inévitable visite médicale par télémétrie interposée. Sergueï Avdeiev a fait les derniers préparatifs de la station. Viktor Afanassiev et moi enfilons nos vêtements spatiaux. Tout se déroule en silence, chacun sait ce qu’il a à faire et le fait sans se poser de questions. La tension est malgré tout sensible, tout rappelle l’ambiance qui précède les combats.
w 5 h 35 : Sergueï referme la porte du sas côté station derrière lui. Commence alors le long processus des vérifications de l’étanchéité des diverses portes, scaphandres et instruments, et la désasturation à l’oxygène pour éviter les bulles d’azote dans le sang.
w 6 h 45 : Les choses sérieuses commencent pour moi, je dois préparer, puis ouvrir la porte du sas. Comme elle n’est plus étanche, il faut patiemment dévisser un à un les 12 écrous supplémentaires qui la retiennent (elle s’ouvre vers l’extérieur). Le scaphandre déjà gonflé résiste à chaque mouvement, nous sommes déjà dans le vide et toujours en impesanteur, les appuis sont difficiles à trouver, surtout ne pas s’épuiser dès le début.
w 7 h 35 : Alors que vous allons franchir les côtes africaines, j’ouvre enfin l’écoutille avec précaution. Je connais l’histoire de Nicolas Boudarine, littéralement éjecté avec la porte hors du sas pour ne pas avoir suffisamment attendu que tout l’air s’échappe. Bien sûr je pense à lui au moment où je tourne le volant de la porte et je vérifie mes attaches. Mais elles ne pèseraient pas lourd si la différence de pression était trop forte. C’est comme si j’avais ouvert la gueule d’un monstre. D’abord un énorme flash qui ne s’arrête pas et des milliers de particules brillantes qui s’échappent du sas en virevoltant. Le soleil est très bas sur l’horizon à l’ouest et nous lui faisons exactement face. Juste le temps de baisser ma visière dorée avant d’être complètement aveuglé. Est-ce cela que l’on appelle le baptême du feu ? Il me faut de longues secondes avant de pouvoir à nouveau distinguer les formes de cet étrange univers. Je m’enhardis et décide de regarder sous moi. Malgré l’obscurité, je vois la Terre défiler à une vitesse étonnante.
Quelques lumières scintillent en bas, les Africains sont chez eux peut-être en train de regarder la télé. Entre eux et moi, le vide intégral ; tout autour, des espaces gigantesques. Longues séquence de grandes sensations.
Viktor derrière moi commence à s’agiter en grommelant à voix basse comme à son habitude. Je me ressaisis rapidement. Je ne suis pas décidé à me laisser intimider tout de suite. Il y a encore trop de chemin à faire. Mais Dieu que c’est impressionnant ! J’attache solidement les deux crochets à l’extérieur et je saute dehors sans réfléchir, mais en essayant de restituer avec précision les gestes appris à l’entraînement. Malgré la sécurité du crochet, mes mains torturées par les gants du scaphandre se crispent sur les mains courantes. Pourtant, il me faut bien les relâcher pour attraper tout le matériel que Viktor sort du sas et pour le fixer à l’extérieur sur les mains courantes. Ne pas fâcher les deux mains, ne pas laisser s’échapper une de ces précieuses expériences, telles sont mes obsessions les premières minutes de mon EVA, et ces maudites mains me font déjà mal.
Alors que nous avons perdu le contact radio avec le sol, nous décidas malgré tout de réaliser l’étape suivante toute proche. Nous devons récupérer l’expérience française Comet installée au mois d’octobre par Sergueï Avdeiev et Guenadi Padalka. C’est une espèce de filet à papillons sophistiqué qui capture les poussières éjectées par les comètes quand elles se rapprochent du Soleil, comme les Léonides en novembre. Nous installons aussi l’expérience exobiologie qui consiste à exposer à l’environnement spatial des acides aminés, constituants primaires des cellules vivantes. Si les dégradations observées sur les chaînes complexes sont graves et irréversibles, on pourra en conclure que la vie ne peut pas provenir du cosmos comme certains l’affirment.
La Terre en-dessous
C’est justement à la vie et à la Terre que je pense en ce moment précis, perché au sommet de Strela : il s’agit d’une poutre articulée à sa base. Depuis cet endroit, Viktor la commande avec des manivelles, pour amener l’autre extrémité libre sur laquelle je me trouve vers la poutre Saphora. Je m’accroche comme je peux à ce frêle esquif qui branle comme un cocotier avec tous nos équipements en vol presque libre autour de moi. De là , je domine la situation, la station Mir 20 mètres sous moi et la Terre encore en dessous. Par un signe du destin, nous survolons à ce moment précis la chaîne de l’Himalaya et je crois reconnaître l’Everest à travers les nuages. 400 kilomètres au-dessous du toit du monde, je commence à prendre confiance, car il n’y a pas d’autre choix dans de telles circonstances. Avec mon seul scaphandre comme protection contre ce milieu sublimement beau et terriblement hostile, je regarde l’Asie 600 kilomètres autour de moi, j’ai dans les yeux l’image de cette armée chinoise enterrée avec son empereur ; caparaçonné dans mon armure moderne, je me sens un peu un de ces chevaliers, montant la garde sur la frontière lointaine et provisoire de notre vieux monde.
Jean-Pierre Haigneré
On retrouve l'ambiance de son film sur son séjour à bord de mir, c'est vraiment fascinant.
[HS]D'ailleurs si quelqu'un a ce documentaire en bonne qualité, je suis preneur. Je l'avais vu sur dailymotion avec une qualité moyenne, mais je l'avait adoré.[/HS]
[HS]D'ailleurs si quelqu'un a ce documentaire en bonne qualité, je suis preneur. Je l'avais vu sur dailymotion avec une qualité moyenne, mais je l'avait adoré.[/HS]
Je rajouterais sur la question posée par Pif que sur MIR, le module d'amarrage à l'avant faisait office de sas pour les EVA. Dans cet espace de 2,5 m de diamètre, les cosmonautes y déposaient leur scaphandre. Une écoutille permettait de l'isoler des autres parties de la station, la salle de séjour et les moteurs à l'arrière.
Pif a écrit:Bon, après avoir un peu fait dans le hors sujet, je vous ai retrouvé ce texte de Jean-Pierre Haigneré qui répondra peut-être à certaines interrogations formulées plus haut...Merci Pif.
Quelle classe ce Jean-Pierre Haigneré, Astronaute et Ecrivain.
Je me rappelle encore de son déplacement en Tunisie avec Claudie, concernant leurs Vols
dans la station Mir, l’amphithéâtre était archi-comble de passionnés de la conquête spatiale,
si ma mémoire n’a pas flanché, c’était à la Cité des Sciences de Tunis.
Pif tu ne sais pas s’il y a une convention de partenariat entre Planète Sciences (France) et la Cité des sciences de Tunis.
Firnas2- Messages : 2416
Inscrit le : 29/09/2008
Age : 72
Localisation : Tunisie
Le chevaucheur des nuées n'est pas trop mal non plus. J.P Haigneré s'y livre plus qu'à l'accoutumé. Il a été écrit en collaboration avec Jacques Arnould (du CNES)
Puis il y a aussi son Carnet de bord d'un Cosmonaute, très illustré.
Jean-Pierre Haigneré a beaucoup conceptualisé, philosophé, spiritualisé son expérience spatial ces dernières années. Son discours est vraiment différent de celui de ses confrères.
Puis il y a aussi son Carnet de bord d'un Cosmonaute, très illustré.
Jean-Pierre Haigneré a beaucoup conceptualisé, philosophé, spiritualisé son expérience spatial ces dernières années. Son discours est vraiment différent de celui de ses confrères.
Invité- Invité
Le partenaire historique de Planète Sciences à Tunis, c'est l'AJST (Association Jeunes Sciences Tunis - www.jeunescience.org.t)Firnas2 a écrit:Pif tu ne sais pas s’il y a une convention de partenariat entre Planète Sciences (France) et la Cité des sciences de Tunis.
J'y ai moi-même organisé un séminaire Espace il y a une petite dizaine d'années et en garde un très bon souvenir.
Mais avec la Cité des sciences, non, rien à ma connaissance.
Merci Pif, encore une fois.
« Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. »
Théocrite Poète (-315 - -250)
« Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. »
Théocrite Poète (-315 - -250)
Firnas2- Messages : 2416
Inscrit le : 29/09/2008
Age : 72
Localisation : Tunisie
Astro-notes ton message est pour Qui:Astro-notes a écrit:Vous auriez du ajouter dans les choix : "je fais d'abord un caca nerveux puis je me jette dehors"
Bon ok où est la sortie ?
Firnas2
ou Pif
ou Spacemen1969
ou un autre membre du FCS?
Firnas2- Messages : 2416
Inscrit le : 29/09/2008
Age : 72
Localisation : Tunisie
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